On a beaucoup épilogué ces derniers jours à propos des indemnités de sortie de l'ancien président du Parlement wallon, José Happart (PS), qui, au crépuscule d'une longue carrière de parlementaire, s'en va sans se soucier du lendemain, lui qui, durant les 48 prochains mois pourra compter sur des émoluments qui, en vertu des règles applicables à tous, atteindront d'ici quatre ans la coquette somme de 513.000 euros brut.
Qu'un parlementaire puisse en sortie de charge toucher des indemnités de départ n'a dans l'absolu rien de choquant, sachant, qui plus est, qu'il n'a pas droit au chômage. C'est même plutôt une bonne chose si on veut garantir l'indépendance des élus, en qui les citoyens placent toute leur confiance, attendant de leurs parlementaires qu'ils veillent, entre autres choses, à l'élaboration d'un cadre législatif le plus juste et le plus en adéquation avec la société qu'ils sont censés incarner.
En revanche, ce qui motive le versement d'indemnités complémentaires (et plantureuses et peu transparentes) à ceux qui ont exercé des fonctions spéciales comme président d'assemblée ne saute pas directement aux yeux. L'entrée en politique doit rester un engagement, elle ne peut déboucher sur un espace de privilèges au risque de provoquer une césure avec la population que les élus sont censés représenter.
Ces indemnités spéciales octroyées aux présidents d'assemblée se justifient d'autant moins qu'à la lecture de leurs déclarations de mandats, il est permis de douter de l'indépendance qu'on attend d'eux. Or, appelés à organiser les débats avec réserve, et le cas échéant, arbitrer les différends qui peuvent se faire jour, lors, par exemple, de la mise à l'ordre du jour de textes de loi, les présidents d'assemblée sont quelque part soumis à un devoir de neutralité. Pourtant, à l'exception de l'ancienne présidente de la FEF aujourd'hui assise au perchoir du Parlement wallon Emily Hoyos (Ecolo), qui déclare sur le site du Parlement wallon ne détenir aucun autre mandat, tous les présidents d'assemblées en fonction cumulent, parfois grassement. Si à Bruxelles, Françoise Dupuis (PS) se limite à être conseillère communale à Uccle, mandataire dans sa zone de police et membre d'une asbl de prévention, certains parmi ses homologues font dans le cumul foisonnant. Bourgmestre de Sambreville, le président du Parlement de la Communauté française Jean-Charles Luperto (PS) dispose en outre de quatre mandats rémunérés dans des intercommunales et au TEC Namur-Luxembourg. Au Sénat, le président Armand De Decker (MR), bourgmestre d'Uccle, est en outre administrateur d'UCB (67.500 euros par an hors jetons de présence). Il dispose également d'une série d'autres mandats non rémunérés, notamment chez Touring, lobby de l'automobile. Président du Conseil communal de Tongres, le président de la Chambre Patrick Dewael (Open Vld), fait dans la sobriété avec deux autres mandats non rémunérés. En Flandre, Jan Peumans (N-VA), président du Parlement flamand est échevin à Riemst. Il dispose de sept autres mandats dont un rémunéré.
On sait que l'homme aux 513.000 euros, José H. cumulait sa fonction avec celle de président de l'aéroport de Liège, un mandat qu'il détient toujours.
M. Happart, pourra par ailleurs continuer à bénéficier en sortie de charge de trois personnes mises à sa disposition par le Parlement wallon dont un chauffeur. Motif? M. Happart continuera à être invité à gauche et à droite en tant que président honoraire du Parlement wallon. Est-ce mettre la démocratie en danger que de renoncer à un pousse-pousse-boudin-compote? Sacrifier un tel acquis social ou légal ne fera pas vaciller l'Etat. A moins que les statistiques de la sécurité routière ne vinssent à s'en ressentir.
Au-delà de la problématique des présidents d'assemblée, il est prégnant de constater que le cumul est un sport fort répandu. Si dans l'absolu, la règle de l'indemnité de départ des parlementaires se justifie pleinement, la politique du cumul parfois grassement rémunéré rend cette règle fort peu cohérente aux yeux de l'opinion publique. Loin de moi l'idée de plaider en faveur d'un parlement aseptisé qui lui aussi ne ferait qu'accroître le fossé qui le sépare de la population. Cumuler une fonction de parlementaire avec un poste de bourgmestre d'une commune de petite taille ou de taille moyenne par exemple peut se justifier. Continuer à exercer une profession peut participer à l'enrichissement des débats parlementaires. Ou alors faudrait-il l'interdire et n'autoriser que des mandats courts de parlementaire (4, 5 ou 8 ans?), c'est une autre piste. Quoi qu'il en soit, les citoyens sont en droit d'attendre d'être représentés tels qu'ils sont, dans leur diversité. Les "élus de la nation" ne peuvent privilégier ou donner le sentiment de privilégier l'intérêt particulier, fut-il privé, particratique ou institutionnel. Et cela, seuls des gages d'indépendance pourront le garantir.
Durum
lundi 14 septembre 2009
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