"There's no such thing as a free lunch". Nos amis ricains utilisent cette expression pour signifier que rien n'est gratuit. Quelqu'un a toujours payé, en définitive, pour le free lunch, le repas reçu avec une boisson, l'article publié sur Google News ou le fichier mp3 téléchargé gratuitement.
Les nombreux internautes, bloggeurs, twitteurs, qui se réjouissent du rejet de la loi française Hadopi (visant à couper la connexion internet de personnes prises en flagrant délit de téléchargement illégal) feignent d'ignorer cette réalité.
Leurs arguments sont curieux. Le risque est grand que la nouvelle autorité de contrôle identifie mal l'origine des téléchargements illégaux, avancent-ils. Mais s'abstient-on de réprimer la fraude fiscale parce qu'il n'est pas aisé de retrouver les auteurs ?
Les meilleurs fraudeurs parviendront toujours à ne pas être pris, poursuivent les détracteurs d'Hadopi. Mais s'abstient-on d'interdire le cambriolage parce qu'Arsène Lupin parviendra toujours à s'en tirer ?
L'argument massue: la privation encourue de la liberté d'expression et d'information sur le web constituerait une sanction disproportionnée par rapport à l'infraction. Mais ici encore, un simple vol à la tire est puni d'une privation de liberté réelle, d'une peine de prison. Et pourtant, priver quelqu'un d'internet serait disproportionné ?
Ce qui sous-tend les arguments anti-Hadopi, c'est au fond la croyance qu'il existe des free lunch, des repas gratuits. C'est une opinion erronée. Un aliment produit dans des conditions de travail acceptables et d'une manière respectueuse de l'environnement, cela se paie. Cette idée semble de plus en plus acceptée quand on observe la croissance du commerce équitable et du bio. Et bien, un disque de qualité, produit par un artiste qui ne soit pas contraint à vivre d'expédients, cela se paie. Un article de presse de qualité, qui ait fait l'objet de vérifications, d'enquête, cela se paie. La culture du gratuit dans la presse, c'est la fin du journalisme d'investigation, comme l'argumente Edwy Plenel.
Ne pas vouloir payer, c'est se condamner à une baisse de la qualité. Les citoyens-devenus-consommateurs qui défendent la gratuité comme un droit quasi-constitutionnel feraient bien de se mettre cette idée en tête.
Colonel Moutarde
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