lundi 16 juin 2008

Traité de Lisbonnne: Quand le peuple vote mal, il faut changer le mode de scrutin

Les Irlandais ont dit "non" au traité de Lisbonne. Pourtant, les dirigeants européens entendent bien le faire entrer en application. Ils le confirmeront ces jeudi et vendredi lors d'un sommet à Bruxelles. Et l'image de la démocratie européenne va en prendre un sale coup.
"Quand le peuple vote mal, il faut changer le peuple", auront beau jeu d'ironiser les europhobes. Comment leur donner tort ? Le bilan populaire de la Constitution européenne/Traité de Lisbonne n'est pas brillant. La Constitution n'a été approuvée directement que par les Espagnols et les Luxembourgeois. Elle a par contre été rejetée en France et aux Pays-Bas, avant d'être repackagée en traité de Lisbonne. Le seul peuple amené à se prononcer sur ce traité a voté contre, alors que les parlements des 26 autres pays ont voté pour ou s'apprêtent à la faire. Comment ne pas conclure à un complot des élites contre les peuples ?
En réalité, le vote irlandais ne nous dit pas grand chose sur le traité de Lisbonne. Sinon que le texte est compliqué, selon le principal argument de ses opposants. Ce n'est pas une grande nouveauté: il a été rendu délibérément complexe - malgré l'expression sarkozyienne de "traité simplifié" - pour répondre aux craintes d'une Europe trop "constitutionnelle". Mais faut-il forcément rejeter un traité parce qu'il est difficilement compréhensible ? Dans ce cas, autant jeter à la poubelle toute la construction européenne, basée sur des textes byzantins. Et pourquoi pas contester aussi les décisions judiciaires, peu accessibles au commun des mortels pour la plupart d'entre elles. On pourrait supprimer les cours constitutionnelles et les remplacer par des jurys populaires, ce serait beaucoup plus amusant.
Il y a un poujadisme dangereux dans cette méfiance vis-à-vis de ce qui est compliqué. Il est aussi très dangereux pour la démocratie de dire que seul le "non" irlandais révélerait l'avis du peuple, alors que le "oui" des 26 autres parlements relèverait d'une forme de technocratie autoritaire.
Le traité de Lisbonne est un texte complexe, parce que l'Europe est complexe. C'est précisément pour cette raison qu'il faudrait le faire approuver par les parlements, mieux à même de l'appréhender. Quand le peuple vote mal, ce n'est pas le peuple qu'il faut changer, mais le mode de scrutin. Parole de despote éclairé.

Colonel Moutarde

9 commentaires:

Anonyme a dit…

Pourriez-vous me dire colonel Moutarde quel est le nombre de parlementaires qui ont lu et compris le texte du traité de Lisbonne ? Et, pourquoi n'ont-ils pas expliqué ce travail au petit peuple ?

Anonyme a dit…

Personnellement, je ne suis pas convaincu qu'approuver parlementairement le Traité sans véritable débat soit la solution la plus démocratique.

Et puis, contrairement au Colonel Moutarde, je trouve que rejeter un texte trop compliqué est un signe d'intelligence plutôt que du "poujadisme dangereux".

Anonyme a dit…

@ melle Pervenche (du même prénom qu'une noniste française fameuse):
La proportion de parlementaires qui ont lu le traité de Lisbonne est sans aucun doute plus élevée que la proportion de la population. Et le fait qu'il ne l'aient pas très bien expliqué relève plutôt d'un éloignement généralisé de la classe politique vis-à-vis des gens que d'un problème propre au traité de Lisbonne.
@ bigmouth
Quiconque veut s'informer sur le traité de Lisbonne trouvera de l'information en abondance sur internet. Il suffit d'y passer quelques heures. On trouve normal de demander leur avis aux citoyens sur un traité qui a été préparé et négocié pendant 7 ans, mais personne ne s'indigne qu'ils ne prennent pas le temps de l'étudier un tant soit peu. Si vraiment on n'a trouvé aucun site, aucune personne pour se le faire expliquer, il est toujours possible de s'abstenir, plutôt que de voter contre.

Anonyme a dit…

Pourquoi pas un vote à la double majorité, les parlements et les peuples.
Là ils seraient obligés de l'expliquer.
Je ne suis pas certaine que les parlementaires comprennent mieux le traité que beaucoup d'Européens.

Anonyme a dit…

je pense pour ma part que l'élément "traité compliqué" n'est qu'une partie du problème. les citoyens qui rejettent le traité le font pour des raisons diverses, certaines légitimes, d'autres non. il me semble que le débat actuel pose le dilemme: "vaut-il mieux une mauvaise Europe que pas d'Europe?"

Anonyme a dit…

Il y a quand même une grande hypocrisie sur le sujet du traité "compliqué". Le principal opposant de gauche à la Constitution, Laurent Fabius, fondait son raisonnement sur le fait qu'elle sacralisait selon lui la libre concurrence, qui était déjà reprise dans les traités précédents sous une forme moins "constitutionnelle". La Constitution prenait en effet la forme d'un texte clair et simple. M. Fabius a considéré comme une victoire du "non" français que cette approche ait été abandonnée pour revenir à un traité classique, donc moins simple à lire.
Aujourd'hui, les partisans du "non" tiennent exactement le discours inverse: le traité serait trop compliqué!
Ce retournement est très révélateur: le traité de Lisbonne est le fruit d'un compromis longuement mûri. Elle atteint un point d'équilibre qui est très difficile à modifier. On peut toujours tout recommencer à zéro, mais il faut se rendre compte de la difficulté de mettre d'accord 27 Etats membres aux traditions très différentes.

@ durum
La question du traité de Lisbonne n'est pas vraiment celle d'une mauvaise Europe ou pas d'Europe du tout. Le traité ne fait qu'énoncer les règles du jeu. Il ne dit rien sur le contenu des politiques économiques, ni sur les politiques d'immigration.
Au contraire, en renforçant les pouvoirs du Parlement européen, il permettra aux citoyens d'avoir davantage leur mot à dire contre l'"Europe forteresse" ou l'"Europe ultra-libérale". Encore faudrait-il qu'ils cessent de donner la majorité à la droite.

Anonyme a dit…

A propos des parlementaires qui se renseignement mieux que les citoyens, voyez le témoignage de Céline Delforge, député écolo au Parl bxl :

"Enfin, heureusement, le MR a fait une intervention très appréciée du ministre et du reste de l’assistance en insistant sur l’importance de trouver une belle résidence au futur président du Conseil qui logera à Bruxelles car le bâtiment risque d’être souvent photographié par la presse internationale (si quelqu’un a des conseils pour la déco, je suis prête à transmettre).

(...)
Lorsqu’il [Doulkeridis] a eu l’outrecuidance de suggérer que les collègues n’avaient probablement pas lu une traitre ligne du TL, de nombreuses protestations se sont fait entendre et beaucoup ont affirmé connaître parfaitement le texte.

Rappelons quand même que les opposants au referendum en Belgique ont toujours affirmé que la démocratie serait respectée grâce aux débats dans nos nombreux parlements. En effet, le débat aura duré à peine deux heures, ce qui est risible au regard du temps d’examen de certaines ordonnances parfois anecdotiques ou purement techniques."


Je ne crois pas que le débat parlementaire soit un énorme garantie démocratique, surtout dans un pays comme la Belgique. Or il me semble indispensable que la construction européenne, qui s'est trop longtemps faite par dessus la tête des citoyens, puisse enfin se faire sous contrôle démocratique. Mais ce n'est bien sûr pas par un simple référendum qu'on réconciliera du jour au lendemain institutions européenes et opinion publique...

cf. mon article à ce sujet : http://www.eigenblogeerst.be/index.php/2008/06/18/30-referendum-irlandais-des-citoyens-desobeissants

Anonyme a dit…

G. D'Estaing lui même sur son blog ne disait-il pas que la Constitution et le traité de Lisbonne c'était du pareil au même.
Alors essayer de nous faire croire le contraire ne va pas nous rendre confiance en nos "représentants".

Anonyme a dit…

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