Quand, en 2001 à Laeken, les dirigeants européens ont entrepris de rédiger ce qui allait devenir le traité de Lisbonne, ils avaient en tête de rendre l'UE plus démocratique, plus efficace et moins compliquée. S'il rend l'Union un peu plus démocratique (avec l'extension des compétences du Parlement) et un peu plus efficace (avec l'extension du vote à la majorité qualifiée), le traité finalement adopté ne la rend vraiment pas plus simple à comprendre. C'est particulièrement le cas pour la présidence du Conseil, dont le fonctionnement deviendra encore plus byzantin.
Contrairement à une idée reçue, la nomination d'un président stable, en la personne d'Herman Van Rompuy, ne signifie pas la fin des présidences nationales tournantes. Car ce président stable, censé assurer plus de continuité aux travaux, ne dirigera que le Conseil européen, c'est-à-dire les réunions des chefs d'Etat et de gouvernement. Les formations inférieures du Conseil resteront quant à elles dirigées selon l'ancien système. Par exemple, le Conseil Ecofin sera dirigé au premier semestre de l'année par la ministre espagnole des Finances, Elena Salgado, puis par Didier Reynders au second semestre. Pas question donc de continuité accrue pour toutes les formations sectorielles, sauf pour les Affaires étrangères. Le Conseil "Relex" sera en effet présidé par Catherine Ashton, la nouvelle Haute représentante pour les politique extérieure. Vous avez dit plus simple, l'Europe ?
Les choses se compliquent encore quant on en vient au Conseil des Affaires générales, le CAG. Il s'agit d'une importante réunion de coordination politique. Pour l'instant, ce sont les ministres des Affaires étrangères qui y siègent. Quand ils ont fini leurs discussions, ils changent de casquette et s'occupent d'Affaires étrangères. Dans le jargon, cette double réunion porte le nom barbare de CAGRE – Conseil des Affaires générales et des relations extérieures.
L'idée originale du traité de Lisbonne était de diviser le CAGRE en deux. Organe transversal, le CAG aurait été présidé par le ministre national en charge des questions européennes, le Relex par le Haut représentant. Vous suivez ?
Et bien, il semble que ce découplage, relativement logique, n'a plus la cote. Premier pays à expérimenter le traité de Lisbonne, l'Espagne semble même en passe de le saboter complètement. La cause ? Les orgueils mal placés de quelques ministres puissants.
Le ministre espagnol des Affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos, n'a pas l'intention de rester les bras croisés pendant la présidence de son pays. Forcé d'abandonner la présidence du Conseil Relex à Catherine Ashton, il compte bien se rabattre sur le CAG. Pas question de laisser ce Conseil à un sous-fifre. Les Belges ont d'ailleurs pris la même décision, puisque ce sera le nouveau Vice-premier ministre en charge des Affaires étrangères, Steven Vanackere, qui jouera ce rôle. Olivier Chastel, secrétaire d'Etat à l'Europe, a été relégué à l'arrière-plan.
Voilà qui rajoutera une couche de complexité à une nouvelle architecture qui n'en avait pas besoin. Une meilleure idée serait que chaque gouvernement se désigne un ministre pleinement compétent pour l'Europe. Il présiderait le CAG. Il pourrait aussi servir à mieux faire comprendre l'Europe aux citoyens. Le travail ne manque pas.
On notera enfin que dans tout ce bazar, la seule personnalité de premier plan qui ne jouera pas de rôle majeur pendant la présidence de son pays, c'est le Premier ministre. Avec Yves Leterme à nouveau à la barre en Belgique, certains pousseront sans doute un soupir de soulagement...
Colonel Moutarde
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire