Les biocarburants n'ont de bio que leur nom. Leur contribution à la lutte contre le changement climatique est sérieusement mise en doute par plusieurs études, qui semblent indiquer que la quantité d'énergie nécessaire pour les produire pourrait égaler, voire excéder, la quantité obtenue. D'autres rappellent que les récoltes énergétiques se font parfois au prix d'une déforestation qui empêche l'absorption de tonnes de C02. Par ailleurs, il est avéré que les carburants agricoles sont partiellement responsables de la hausse des prix alimentaires, une tendance qui suscite l'inquiétude croissante des Nations Unies.
La Commission européenne refuse pourtant de remettre en question son objectif ambitieux d'atteindre 10% de biocarburants dans les transports d'ici 2020. Alors que le débat gronde, les commissaires rappellent d'une seule voix que les carburants qui seront consommés en Europe devront être produits de manière durable (voir notamment les blogs de Mariann Fischer Boel, Andris Piebalgs et Margot Wallstrom). Ils savent de quoi ils parlent, puisque la directive qu'ils ont eux-mêmes proposée le 23 janvier dernier établit effectivement un critère de soutenabilité, basé sur les risques de déforestation et sur les prix alimentaires.
Mais ce critère, dont le libellé exact est actuellement débattu par les Etats membres et le Parlement européen, pourrait devenir un simple cache-misère. Et pour cause. Gravé dans le marbre depuis mars 2007, l'objectif de 10% de biocarburants a amené de nombreux agriculteurs, mais aussi des spéculateurs, à investir massivement. Des surfaces ont été achetées, la production a commencé, en Europe, mais aussi dans de nombreuses autres régions du monde qui espèrent abreuver les pompes du Vieux continent. Les investisseurs attendent maintenant un bon retour sur leurs placements. Ils forment un lobby déterminé à affaiblir au maximum le critère de soutenabilité.
Or on sait le poids des lobbies dans l'Union européenne. L'attitude de la Commission, qui refuse d'admettre clairement l'existence d'un problème, montre que le lobby des biocarburants a trouvé une oreille attentive à Bruxelles, où la réduction de la dépendance énergétique est un objectif au moins aussi important que la protection environnementale. Vu de la Commission, la hausse des prix agricoles n'est pas non plus forcément une mauvaise chose.
En Belgique aussi, où on a pas mal investi dans la production de carburants agricoles, le gouvernement pourrait être incliné à ne pas trop vouloir gêner le secteur...
Colonel Moutarde
vendredi 21 mars 2008
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