samedi 13 décembre 2008

Les louvoiements d'une presse porteuse d'angoisse

Le décret mixité sociale à l'école est donc mort après une longue agonie. Au centre d'un véritable jeu de massacre digne d'une fancy-fair scolaire, il a fini par succomber sous les coups de boutoir de parents angoissés (à tort ou à raison, sachant que l'angoisse est toujours mauvaise conseillère), d'attaques politiques parfois fondées (?), mais souvent électoralistes (pour rester poli), de directeurs jésuites, et d'écrits assassins dans la presse. A cet égard, il est intéressant de constater que, concernant la couverture de ce dossier, notamment, les journalistes et responsables de rédaction sont extrêmement impliqués dans le sujet qu'ils traitent.
Un nombre très important de responsables de rédaction et de journalistes chargés de l'analyse institutionnelle en Belgique francophone habite des quartiers privilégiés dans le sud-est de Bruxelles, en périphérie (flamande) de la capitale (dans les communes à facilités), et en Brabant wallon, soit les régions où se sont révélés une série de problèmes, minoritaires, mais surexposés dans la presse.
Sans vouloir porter aux nues un décret, dont on peut à tout le moins saluer la courageuse volonté d'avoir voulu s'attaquer à un problème majeur dans la société, les inégalités sociales, singulièrement dans l'enseignement, il est pour le moins permis de dire que le tollé qu'il a suscité est sans commune mesure avec le silence honteux qui dans les milieux bien-pensants, y compris journalistiques, accueille depuis des décennies les dénonciations de parents refusés à l'inscription pour port de patronyme inadéquat.
Cette couverture biaisée de l'information ne porte d'ailleurs pas uniquement sur l'enseignement. C'est aussi le cas sur le plan communautaire. Sans vouloir porter du crédit à la politique hégémonique flamande que défend trop souvent la presse du nord, l'analyse que fait la presse francophone de la situation de ses lecteurs dans les communes à facilités de la périphérie transpire elle aussi le vécu de ses éditorialistes fransquillons dont certains ne sont parfois pas bien loin de comparer la vie de leurs congénères à celle des déplacés du Kivu.

Durum

13 commentaires:

Anonyme a dit…

Durum voudrait-il un décret mixité pour la presse ? Moi je suis pour, comme celui celui pour l'école d'ailleurs...

La Boulette a dit…

Finalement, ce qui compte, ce n'est pas tant ce qu'on dit mais qui le dit et à quel moment. C'est un peu réducteur, je pense...

A propos du décret "mixité", soyons francs, ce n'est pas une réussite. L'objectif est louable et tout le monde le partage. Mais le problème est vaste et ne souffre pas une réponse simpliste. Or, c'est bien ce qui s'est passé, malheureusement. Plutôt que d'appréhender ce phénomène dans toute sa complexité, les auteurs du texte ont désigné un ennemi - des directeurs d'école qui refuseraient d'inscrire des élèves au mauvais profil- et fondé toute leur action contre eux. C'est un peu maigre et ça a des relans soviétiques: si le plan quinquennal échoue, c'est à cause des saboteurs et, hop, on purge.

Quant aux francophones de la périphérie, ils sont environ 100.000 (plus que la Communauté germanophone, l'équivalent d'une ville comme Namur) et leur problème mérite d'être pris en considération. La Flandre a décidé ouvertement de tout faire pour restreindre leurs droits voire les supprimer. Le Conseil de l'Europe l'a plusieurs fois rappelée à l'ordre mais elle s'en fiche. Tout démocrate qui se respecte ne peut l'accepter... Certes, il s'agit de quartiers cossus où il fait bon vivre et dont la réalité est bien éloignée de celle du Kivu, mais l'exercice de droits démocratiques ne peut être conditionné par le niveau de fortune, dans un sens comme dans l'autre.
La Flandre se grandirait à accepter que sur son territoire vit une minorité francophone qui mérite respect et protection au même titre que d'autres minorités... Là encore, une autorité publique désigne un ennemi d'Etat. C'est dangereux: les grands massacres commencent de cette façon.

Anonyme a dit…

"C'est dangereux: les grands massacres commencent de cette façon" : j'ai déjà lu beaucoup d'énormités sur le sujet, mais là, ça dépasse l'entendement ! Au secours, il faut vite une force d'interposition pour Kraainem, Linkebeek et Wezembeek !

Pour ce qui concerne le décret mixité, c'était une idée révolutionnaire. Beaucoup trop pour des conservateurs comme nous. C'était la bonne réponse - et pas une réponse simpliste - aux discriminations qui touchent la plupart des jeunes qui portent un mauvais patronyme. Discriminations qui sont d'ailleurs autrement plus préoccupantes que celles qui semblent frapper si violemment la pauvre minorité francophones de la périphérie…

La Boulette a dit…

C'est joli mais guère d'arguments, des slogans tout au plus...

Je ne prétends pas que l'on est à la veille d'un pogrom en périphérie mais simplement que le raisonnement utilisé ou cautionné par une partie considérable de la classe politique flamande, à savoir désigner un ennemi d'Etat, est le même que celui qui a guidé les grands massacres dans l'histoire: de la Saint-Barthélémy au Rwanda en passant par la Solution finale, les purges staliniennes ou la révolution culturelle... Un peu ce qu'un journaliste du NY Times (oh, zut, ces salauds d'américains!) qualifiait de fascisme non violent en parlant de la périphérie.
Les manifestants qui défilaient dans les années '30 en scandant "Les juifs et les métèques dehors!" font furieusement penser à ceux qui crient "Franse ratten, rol uw matten!". Les raisons du succès de l'extrême-droite en Flandre sont multiples mais il en est une qui saute aux yeux: l'absence de tout travail de mémoire sur la collaboration d'une partie structurelle du mouvement flamand avec le régime nazi. Le Vlaams Belang en est issu, de même que le TAK et autres excités qui comparent les francophones (fussent-ils nantis) à des rats.

Quant au décret inscriptions, est-ce une réponse élaborée que de dire: premier arrivé, premier inscrit? Ca sonne plutôt loi de la jungle. Je pense que le problème mérite une approche un peu plus volontariste et incitative, dans les quartiers défavorisés, que celle-là.

Mexicano

Anonyme a dit…

Il me paraît assez clair que le système du premier arrivé, premier servi (ou celui du tirage au sort) est plus démocratique que celui de l'inscription (ou plutôt de la non-inscription) au faciès !

La Boulette ressort le papier d'un correspondant du New York Times qui a essayé en vain d'acheter des donuts sur le marché de Merchtem ! C'est le monde à l'envers ! Permettez-moi de trouver moi aussi l'argument un peu court... L'autre argument éculé "nationalistes flamands = collabos nazis" est un autre raccourci qui n'honore pas ceux qui le colportent.
Vous oubliez également le chant traditionnel "les wallons c'est du caca" scandé sur les stades de foot du pays. Ca fait les premiers titres des JT de la RTBF : c'est bien la preuve que c'est dangereux et que ça constitue une atteinte grave à nos droits élémentaires ! Et dire que pendant ce temps là, les cris de singes qui n'arrêtent pas de fuser aux alentours de terrains lorsqu’un joueur noir a le ballon n'émeuvent (presque) plus personne ! La démagogie n'est donc pas l'apanage des seuls (politiciens) flamands...

Au fait, faut arrêter de sniffer de la Pritt, ça altère gravement les facultés de discernement !

La Boulette a dit…

Faut jeter le petit livre rouge à la poubelle! Ca n'a rien donné de bon et on fait rien qu'à dire du mal des Japonais.

Quoi, une partie du mouvement flamand n'a pas collaboré? Et le VNV, et Verdinaso, c'était des cercles colombophiles? Et qui en sont les héritiers directs? Mais oui, le Vlaams Belang, le Voorpost (ex-VMO) et autres TAK qui viennent manifester dans la périphérie.

Quant au football, ça me fait plaisir! Je vomis autant les supporters qui imitent les cris de singe quand un joueur noir monte sur le terrain que ceux qui s'en prennent aux Wallons! D'ailleurs, je vomis tous les supporters! Si un jour on devait à nouveau recruter des SS, c'est dans les stades de foot qu'on irait les chercher. Ils sont là, alignés en rangs d'oignons, voués corps et âme à ce club dont ils sont si fiers, prêts à écraser ceux d'en face au premier signal... De toute façon, ce sera pas eux mais celui de derrière qui poussait et celui de devant qui criait fort. Et qu'on ne me vienne pas m'emmerder avec la ferveur populaire, la communion du sport et autres conneries à la Gérard Holtz! C'est du pipeau! Les milliers d'andouilles qui se sont ruées à Liège pour célébrer la victoire du Standard ne valent pas mieux que celles qui ont fait la file devant le cercueil du roi Baudouin!

Quant à l'article du NY Times, je pense qu'il était un peu plus fouillé que ça... mais c'est sans doute de la propagande US.

Mexicano

Anonyme a dit…

C'est bien ce que je craignais, c'est pas de la pritt qu'il prend, mais de la pattex...

PS. : Standard champion !

Anonyme a dit…

Agricultrice m'avais bien parlé de ces échanges de mails entre personnes avarties tournant au dialogue. Je confirme... Impressionnant!!!

Anonyme a dit…

si je peux en rajouter à ce dialogue entre notre ami de la terre et mon charmant confrère usurpateur de la ligne éditoriale de La Boulette;-) je dirais que le décret mixité a échoué car il n'est qu'un outil qui ne pouvait à lui seul s'attaquer à un système valétudinaire mû par les principes libéraux qui ont inspiré notre Constitution. En ma qualité de modeste contribuable, il me va très loin d'entendre les directeurs d'école se retrancher derrière la sacro-sainte autonomie scolaire pour refuser les "diktats" du législateur. Notre système conservateur de neutralité permet les dérives à l'origine des inégalités scolaires. Changeons en profondeur notre démocratie moribonde. Oui à une laïcité de combat, à l'excellence pour tous, à l'inculcation d'un esprit critique. Que les colons du sud-est de Bruxelles, de la périphérie ou du Béwé qui refusent le changement au nom de l'autonomie le fassent avec leurs propres deniers.

Anonyme a dit…

Je n'ai jamais nié le complexe congénital flamand qui mû par l'angoissance de l'errance dans notre monde globalisé, qui trouve ses racines dans une terre manifestement riche en germes propices au racisme latent ou exprimé. Je trouve intolérable qu'on nie la présence culturelle francophone en décourageant les bibliothèques ou d'autres actions en ce sens.
Mais je ne pense pas que le sieur Maingain et sa clique, dont les médias fransquillonants sont friands des envolées lyriques, soient les meilleurs ambassadeurs de cette noble cause. Ces gens transpirent que trop bien le mépris qu'ils affichent pour le flamand, considéré dans les sphères bien pensantes, comme un brave paysan.
Quant au nationalisme flamand, il a certes largement flirté avec le nazisme pour mieux servir sa cause, et c'est inexcusable, mais en rester là serait réducteur. Tous n'ont pas choisi cette voie et tous aujourd'hui ne revandiquent pas cet attachement. Il est vrai que la Flandre, malade, doit se soigner et étudier son passé. Mais la pointer du doigt sans nuance serait comme évoquer les élus cdH ou MCC comme les héritiers du fascime léopoldien. Là aussi, il y a matière à revenir sur le passé.

Anonyme a dit…

Qu'est-ce que Durum peut être chevre-choutiste ! Mais bon, ses recadrages sont souvent pertinents.
Au fait, on a des nouvelles de Mexicano ?

La Boulette a dit…

Il est sous protection: il a D'Onofrio sur le dos...

Plus sérieusement, l'incapacité ou plutôt l'absence de volonté chez les ou plutôt certains francophones de la périphérie à parler néerlandais est choquante... mais dans toute démocratie qui se respecte, nul ne peut les y contraindre et ce n'est pas un prétexte pour nier les droits qui sont les leurs en tant que minorité. Mais Maingain et son discours anti-flamand m'exaspèrent. Que les choses soient claires!

Quant au décret inscription, au risque de me répéter, je ne conteste pas l'objectif mais le moyen utilisé me paraît très réducteur. De ce que j'ai pu entendre de divers enseignants, c'est que la rèlge "premier arrivé, premier inscrit" ne résolvait rien et foutait surtout le bordel dans les écoles qui auparavant ne connaissaient pas de problème. Les quartiers et écoles concernés sont connus. Ils sont essentiellement situés à Bruxelles. Pourquoi ne pas imaginer une action plus ciblée et incitative, inspirée -pourquoi pas?- des principes de l'"affirmative action" plutôt que de prendre une mesure, certes spectaculaire, mais sans effet?

Mexicano

himself a dit…

"l'incapacité ou plutôt l'absence de volonté chez les ou plutôt certains francophones de la périphérie à parler néerlandais est choquante..."
??

"Maingain et son discours anti-flamand m'exaspèrent."

Où ??