samedi 8 novembre 2008
Régulation du système financier: la grande désillusion
Deux mois après le débarquement en Europe de la crise financière et les annonces incantatoires d'une efficace régulation du système, force est de constater que les autorités américaines, européennes, et belges, pour ce qui nous concerne, en sont restées aux vagues déclarations d'intention voire dans les meilleurs des cas à arrêter des positions très consensuelles. Les seules véritables décisions prises à ce stade ont été relatives à la nationalisation des pertes et à la privatisation des profits.
Le président américain fraîchement élu Barack Obama, la nouvelle icône mondiale (;-)), a annoncé un important plan de relance mais il est resté muet quant à la nécessité de réguler les marchés. Laissons-lui le bénéfice du doute, il n'est pas encore président en fonction. Paroles, paroles, paroles restent ses maîtres mots.
Le Conseil européen préparatif au Sommet mondial de Washington a lui aussi accouché d'une souris. Le chef de groupe socialiste au Parlement européen, Martin Shulz avait ironisé à propos du chef d'Etat français Nicolas Sarkozy, actuel président du Conseil européen, soulignant qu'il parlait depuis la crise comme un véritable socialiste, tellement il s'est reprofilé une fois le vent tourné. Vendredi à Bruxelles, Nicolas Sarkozy a rassuré les financiers. "Nous ne voulons pas passer d'une absence de réglementation à trop de réglementation", a-t-il prévenu. Au-delà, on n'est pas plus avancé.
Le plan européen n'accouche que de principes dont la volonté de "confier au FMI un rôle central dans une architecture financière plus efficace". Balaise. Plus efficace pour qui? Quelle architecture? Et surtout, pourquoi le FMI? Cette institution dont l'ancien vice-président de la Banque mondiale, Joseph Stiglitz, affirme que ses prescriptions sont "en partie fondées sur l'hypothèse dépassée selon laquelle le marché aboutit spontanément aux résultats les plus efficaces" (1). Ce n'est pas l'architecture mais l'idéologie sous-jacente qu'il faut changer. Mais cela, la droite ne le permettra pas.
En Belgique aussi, on allait voir ce qu'on allait voir. Le président du PS, Elio Di Rupo, en perd régulièrement sa voix ces dernières semaines à force de crier au démon ultra-libéral à enfermer au plus vite dans le carcan de la régulation.
Et vendredi, le Conseil des ministres a approuvé une décision visant à limiter les parachutes dorés des patrons d'entreprises cotées en bourse. En principe, ces indemnités seront limitées à 12 mois de salaire fixe au maximum. Limitées par des paramètres temporels donc mais pas financiers. C'est bingo pour les patrons du BEL20. A titre d'exemple, alors que l'administrateur-délégué d'Agfa-Gevart a droit aujourd'hui à une indemnité de départ d'1,540 millions d'euros, selon le rapport annuel de l'entreprise; il pourra partir, en vertu des nouvelles règles, avec la coquette somme de 3,116 millions d'euros, a calculé Ecolo. Joli foutage de gueule!
In fine, ce n'est pas le système mais le gouvernement lui-même qui est transparent.
Il faut dire que quand en son sein on se prête au jeu du délit d'initié, certains n'ont pas intérêt à plus de régulation. Le ministre des Affaires étrangères, Karel De Gucht, dément tout délit d'initié alors que son épouse de magistrate a vendu pour 500.000 euros d'actions Fortis la veille de la cession des actifs aux Néerlandais et de l'effondrement au plus bas du cours boursier. Une pure coïncidence d'agenda. N'est pas chef de la diplomatie qui veut.
Durum
(1) La grande désillusion, Joseph Stiglitz, janvier 2002
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4 commentaires:
Il me semble qu'en limitant "dans le temps" le parachute, on a réglé le problème. Reste évidemment que les indemnités peuvent restées conséquentes... puisqu'elles sont liées au revenu. On peut peut-être entamer un nouveau débat, celui de la rémunération!
Malheureusement, on entend moins de voix réclamer un débat sur les rémunérations (hormis celles des salariés).
Bonjour,
Pure curiosité : avez vous encore la source pour ce qui est du délit d'initié ( supposé, avéré ?) de De Gucht ?
C'est peut être anecdotique, mais savez vous si l'équivalent de l' AMF en France s'est penché sur son cas ?
@ étudiant,
la CBFA, l'équivalent belge de l'AMF, a ouvert une enquête sur l'affaire, qui a été portée à sa connaissance par une source anonyme.
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