En 2001 à Laeken, les Européens ont lancé une vaste réforme institutionnelle qui avait pour objectif de rendre l'Union à la fois plus démocratique, plus transparente et plus efficace. Après de nombreuses péripéties, ce processus a débouché sur le traité de Lisbonne, en vigueur depuis trois mois. Il est trop tôt pour émettre un jugement définitif sur la manière dont ce traité affecte le fonctionnement de l'Union. L'Europe sera plus démocratique, c'est certain, tant les pouvoirs du Parlement se sont accrus. Mais savoir si elle sera plus efficace et plus compréhensible pour les citoyens est une autre paire de manches.
Très occupés à mettre en oeuvre les règles qu'ils ont eux-mêmes créées, politiques et eurocrates semblent perdus dans un brouillard épais, surpris par les nombreux vides d'une texte qui n'a qu'une portée très générale.
Le traité institue par exemple un ministre des Affaires étrangères aux pouvoirs étendus, à la tête d'un véritable corps diplomatique européen. L'idée était séduisante, mais sa concrétisation a ouvert la porte à des tiraillements multiples. Du Kosovo à l'Irak en passant aux relations avec les anciennes colonies, les pays européens ont en effet des intérêts divergents qu'il est difficile de réconcilier dans un service commun. Etats les uns contre les autres, ministres des Affaires étrangères contre la Commission, fonctionnaires contre diplomates: tout le monde se tire dans les pattes.
Mais c'est surtout en matière économique que le traité de Lisbonne est en plein flou. Alors qu'auparavant, la Commission européenne était le seul organe à s'approche d'une espèce de gouvernement européen, on se demande aujourd'hui qui tient les rênes de l'Union. La Commission est la seule institution qui n'ait pas vu ses pouvoirs renforcés dans le traité. Au contraire du Conseil européen (réunion trimestrielle des chefs d'Etat et de gouvernement) qui est devenu une vraie institution, avec un président stable, en la personne d'Herman Van Rompuy. Celui-ci veut faire du Conseil européen le vrai gouvernement de l'Europe - en rupture d'ailleurs avec la tradition belge "communautaire". Il en résulte un flou certain, qui est aggravé par le maintien de présidences nationales pour les formations sectorielles du Conseil des ministres. L'Espagne, la présidence en titre, essaie elle aussi de peser sur les débats, qui en sont d'autant moins lisibles.
Dans quelques mois, quand la poussière sera retombée, il sera plus aisé d'établir un bilan de la réforme institutionnelle. Mais les discussions byzantines dans lesquelles les Européens s'enlisent à nouveau laissent penser qu'ils sont finalement un peu comme les Belges: perdus dans des discussions institutionnelles sans fin et incapables de réformer la société.
Colonel Moutarde
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